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« Anticiper : c’est la clé du digital »

Interview de Benjamin Michelier, directeur associé chez Ola Compta.

Comment votre profession d’expert comptable s’adapte-t-elle au monde du digital ?

Je travaille dans le cabinet d’expert comptable Ola Compta, à Marseille, au sein d’un groupe implanté dans toute la France. Nous sommes spécialisés dans l’accompagnement des petites entreprises comptant entre 0 et 10 salariés, pour la gestion administrative (bilans, comptes de résultats…). Les secteurs représentés sont variés. Nous avons également un service dédié à la création d’entreprise.

Le métier d’expert comptable évolue avec les obligations légales. La télédéclaration est une pratique qui a été plus subie que choisie par la profession, et c’est dommage. Ce n’est pas l’administration française qui devrait guider notre digitalisation, nous devrions faire preuve de plus d’innovation pour nos clients (je parle pour l’ensemble des experts comptables).

Les entrepreneurs et les porteurs de projets ont ils des attentes différentes aujourd’hui ?

Oui, complètement ! Les attentes sont très différentes depuis quelques années. Un entrepreneur a bien souvent ses propres méthodes de travail, il connaît bien son secteur et ses questions vont porter sur des sujets très précis, comme préparer un départ à la retraite par exemple. Nous aidons nos clients à affiner leurs connaissances, et en cela nous avons un rôle de conseil qui n’était pas aussi important auparavant. Et j’estime qu’en tant qu’experts comptables, plus qu’un rôle, c’est un devoir.

Où se situe la création de valeur de la part de l’expert comptable dans les nouveaux schémas de relation ?

Historiquement, l’expert comptable réalise le bilan et le compte de résultat. Cela se fait sur un temps très long : en avril 2015, on arrive avec des chiffres dont certains datent de janvier 2014… dans ce contexte, c’est difficile d’être réactif. C’est le temps de l’obligation légale qui rencontre le temps de l’instantané propre à notre époque connectée. Le nouveau schéma, c’est donc notre capacité à anticiper, aider notre client à se projeter en analysant l’information en temps réel.

Comment l’offre de service du cabinet s’adapte-t-elle pour accompagner les chefs d’entreprises ?

Notre façon de communiquer a évolué. Il nous faut être réactif, et développer pour cela les outils adéquats. Nous proposons ainsi à nos clients une plateforme digitale avec un accès à des vidéos explicatives sur des sujets variés. Sur son espace personnel, il a accès à toutes ses informations pratiques, et peut nous contacter très rapidement, par Skype par exemple. On peut lui fournir des données mises à jour en temps réel (graphiques, catégorisation des opérations). Côté utilisateur, il y a de nouvelles fonctionnalités comme –depuis peu- la possibilité de photographier une note avec son smartphone pour l’envoyer directement sur la plateforme ! Un gain de temps considérable pour ceux qui passent leur temps à courir après leurs justificatifs… Tout cela a nécessité le développement d’un logiciel inédit, qui a été possible grâce à la puissance du groupe et qui fait aujourd’hui notre valeur ajoutée. Ce n’est pas facile à mettre en place au début, mais ça vaut le coup.

Quelle est votre vision de la profession dans 20 ans ?

La technologie n’a pas fini de transformer notre manière de travailler. Dans quelques années, la saisie comptable n’aura plus aucune valeur ajoutée, notre mission traditionnelle n’existera plus. On se recentrera sur une mission d’accompagnement, et nos conseillers devront être encore plus pointus. Le web donne accès à toutes les informations, il faut donc comprendre en quoi on peut apporter quelque chose qui fasse vraiment la différence.

Un autre point important, c’est la concurrence. Aujourd’hui les tarifs peuvent varier fortement entre plusieurs cabinets : le problème c’est que certains ne sont pas bien équipés, ce qui fait qu’ils sont obligés de facturer plus cher un même service. Dans ce contexte, investir est une question de survie.

Notes & références