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Sylvain Bartolomeu : « Se digitaliser, c’est faire le tri entre l’essentiel et l’accessoire »

Sylvain Bartolomeu est consultant associé chez Franchise Management, leader en création et développement de réseaux. Il partage sa vision de la digitalisation, et notamment son impact sur le métier de franchiseur.

Sylvain, en quoi consiste votre rôle de conseil auprès des réseaux de franchise ?

Chez Franchise Management, notre mission est d’accompagner le dirigeant franchiseur dans la création et la mise en place de son réseau dans le temps. On s’est occupés de près de 250 enseignes, parmi les plus importantes qui existent en France. En plus de dix ans, j’en ai personnellement suivi une centaine, ce qui m’a permis d’approcher tous les secteurs d’activités qui existent dans le domaine de la franchise.

Vous avez donc pu observer de près la montée du digital. Qu’en retenez-vous ?

La place du digital dans la franchise a deux facettes : d’abord l’impact sur le premier métier (le coeur d’activité du réseau) et ensuite les conséquences sur le deuxième métier, celui de franchiseur. Pour ce second aspect, il s’agit de développer le réseau, générer des candidats, trouver de nouveaux franchisés. Cela induit une profonde remise en question sur la manière de fonctionner au quotidien. Certains réseaux ne sont pas présents sur le web et s’interrogent sur l’absence de candidats… Le digital est encore trop souvent subi, et pas assez anticipé.

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Vous réalisez régulièrement des audits de réseaux. Quelle place accordez-vous à l’étude du digital ?

Lorsqu’on réalise un audit, on a pour habitude de mener un benchmark. On compare les pratiques d’un réseau par rapport aux meilleures pratiques des réseaux performants. Dans ce cadre, beaucoup d’éléments sont liés au digital. Par exemple, auditer une marque sans penser e-reputation n’a pas de sens. Idem pour la dématérialisation, qui est essentielle dans le process de génération de candidats à la franchise et de suivi d’un franchisé dans le temps.

En fait, quand on étudie l’impact du digital sur un réseau de franchise, il faut savoir faire le tri entre ce qui est essentiel et ce qui est accessoire. Le bon repère, c’est de se demander : qu’est-ce qui crée de la valeur pour les franchisés ? Le but, c’est d’aider nos clients à bien gérer leur digitalisation en distinguant les actions qui ont du sens de celles qui génèrent peu de performance.

Et justement, comment expliquer que certains réseaux aient plus de difficultés que d’autres à prendre le tournant digital ? 

En trois mots : le capital humain. Certains réseaux sont naturellement en mouvement, capables de se remettre en question et d’affronter les révolutions. D’autres, en revanche, ont beaucoup plus de de difficultés à appréhender le changement. Et il n’y a pas de mystère : la culture d’un réseau est déterminée par les femmes et les hommes qui le composent.

La clé d’entrée pour maîtriser cette donnée, c’est la qualité du recrutement et du management. Il s’agit de créer un bon équilibre entre tous les franchisés, pour que l’intérêt général prime sur l’intérêt individuel. Or, souvent, ce management des RH est négligé. Gérer le cycle de de vie de son réseau, la pyramide des âges, la mixité… ce sont des sujets trop peu développés.

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Et quelles sont les pratiques vertueuses à mettre en place ? 

Il s’agit d’instituer un mouvement permanent dans un réseau. Faire prendre conscience à ses équipes que tout peut changer. Fini le temps où l’on pouvait être leader pour dix ans sans se remettre en question, aujourd’hui il y a une accélération des choses qui bouleverse tout le fonctionnement d’un réseau.

Le principe de base de la franchise, c’est la transmission d’un savoir-faire. Et si le savoir-faire change, la transmission aussi est remise en question. C’est ça, le noeud de la transformation digitale ! La bonne pratique, c’est de faire participer les franchisés pour qu’ils soient concernés par les évolutions du métier.

En quelque sorte, on se dirige vers un système plus horizontal entre les acteurs d’un même réseau ?

C’est tout à fait cela. Et d’ailleurs, c’est la définition initiale d’un réseau : chaque membre a un rôle à jouer, chacun est un acteur à part entière. Le franchiseur s’adresse à ses franchisés, mais deux franchisés peuvent également échanger entre eux. On n’a pas le choix, le consommateur exige cette fluidité. On le voit bien avec le cross-canal : il veut pouvoir acheter sur Internet et se faire livrer chez tel ou tel franchisé en fonction de ses impératifs. La réponse à cette demande ne peut s’écrire que collectivement.